Histoire
Histoire
C’est dans la partie chilienne de la Patagonie que l’on a découvert les plus anciennes traces de vie humaine avec la présence de vestiges datant du XIe millénaire av J-C. Plus tard, des peuples sédentarisés ont développé l’agriculture, d’abord dans les régions du Nord-Ouest et de Cuyo, puis dans l’actuel Nord-Est. Des peuples nomades de chasseurs-cueilleurs évoluaient également en Patagonie et dans la Pampa. Au cours des XIVe et XVe siècles, l’empire Incas s’est étendu sur les territoires du Nord-Ouest jusqu’à Mendoza.
La Conquista : la colonisation des Européens
Le fleuve Rio de la Plata est découvert en 1516 par Juan Diaz de Solis. C’est à partir de l’embouchure de ce fleuve, la plus large du monde, que débutera la colonisation du territoire qui deviendra l’Argentine. En 1536, Pedro de Mendoza établit une colonie sur le site de l’actuel Buenos Aires mais la ville nouvelle sera abandonnée en 1541 à cause du manque de ressources naturelles de la Pampa, peu propice à un établissement durable. Le peuplement de la région se fait à partir du Pérou espagnol, grâce à la découverte en 1543 de la route Pérou-Rio de la Plata. Des villes se créent ainsi le long de cet axe : Santiago del Estero (1550), Mendoza (1561), Tucumán (1565), Cordoba (1573). En 1580, Juan de Garay fonde, pour la seconde fois, la ville de Buenos Aires.
La vice-royauté du Rio de la Plata
En 1617, la colonie espagnole d’Asunción est divisée en deux : Paraguay et Rio de la Plata. Cette dernière province obtient en 1776 le statut de vice-royauté, avec sous son administration les territoires du Haut-Pérou (actuelle Bolivie) et ses mines d’argent. La création de cette vice-royauté répond notamment à la volonté espagnole de donner les moyens à cette province de contrer l’expansion portugaise sur la rive Nord du Rio de la Plata. Le développement de Buenos Aires capitale de la nouvelle vice-royauté, consacre l’importance de la route atlantique, au détriment de la route du Pérou.
La vice-royauté du Rio de la Plata connaît un développement rapide : les régions agricoles autour de Tucumán et Cordoba abreuvent les marchés péruviens et chiliens, tandis que le bétail, qui prospère dans les vastes étendues de la Pampa, permet l’exportation de viandes et de cuirs. Dans les villes, et plus particulièrement à Buenos Aires, se constitue une classe de riches marchands qui souhaitent la liberté totale du commerce ; ils l’obtiendront en 1795, le commerce traditionnel étant interrompu par le blocus britannique.
L’indépendance (1806-1820)
Dans le cadre des guerres napoléoniennes, qui voient l’Espagne et la Grande-Bretagne s’affronter, les Britanniques occupent Buenos Aires. La ville étant libérée par des milices locales, le cabildo (conseil municipal) renverse le vice-roi espagnol. Une deuxième invasion britannique, en 1807, est également repoussée par les milices argentines. Ces épisodes ont montré la capacité de la population de la vice-royauté à assurer sa propre défense sans l’aide de la puissance tutélaire espagnole.
Les partisans de l’indépendance se manifesteront dès lors rapidement : le 25 mai 1810, ils imposent à la colonie une junte pro-indépendantiste. Mais cette indépendance de fait, bien que reconnue théoriquement par le roi d’Espagne Ferdinand VII, ne s’instaure pas sans difficultés. C’est seulement le 9 juillet 1816 que le Congrès de Tucumán proclame l’indépendance de la colonie sous le nom de « Provinces Unies du Rio de la Plata », sous l’impulsion des leaders José de San Martin et Manuel Belgrano.
De son côté, le Congrès argentin, dominé par l’oligarchie de Buenos Aires, adopte une constitution unitaire et centraliste le 22 avril 1819. Cependant, il y a une grande disparité entre d’une part Buenos Aires, ouverte au commerce international dominé par une caste de négociants et d’autre part les provinces de l’intérieur du pays, aux économies fermées sur elles-mêmes.
La dictature sous Juan Manuel Rosas
En 1829, un riche éleveur de la province de Buenos Aires, Juan Manuel de Rosas, s’impose comme l’homme fort du pays en devenant le gouverneur de la province de Buenos Aires. Rosas favorise l’oligarchie des propriétaires terriens et agit en faveur du protectionnisme pour satisfaire les intérêts des provinces. Promoteur du fédéralisme, il maintient un pouvoir central à niveau minimal. En 1852, il est renversé par l’un de ses anciens alliés, Justo José de Urquiza, gouverneur de la province d’Entre Rios.
De 1862 à 1880, l’oligarchie des grands négociants et propriétaires terriens de Buenos Aires s’impose comme le noyau dominant de la classe dirigeante argentine. En 1880, Buenos Aires devient la capitale fédérale de la République argentine. Elle est à cette occasion séparée de sa province, qui prend comme capitale La Plata.
En parallèle des tensions politiques, la structure économique de l’Argentine moderne se met en place pendant le XIXe siècle. L’élevage se développe, le chemin de fer conquiert la Pampa, et les derniers autochtones échappant encore au contrôle de l’état argentin, dans la Pampa et en Patagonie (Mapuche et Tehuelche) sont déplacés ou éliminés à la suite d’une série de campagnes militaires (1876-1879).
La prospérité : règne oligarchique et gouvernement radical
De 1880 à 1916, l’oligarchie des propriétaires fonciers et des exportateurs domine sans partage la vie politique argentine. Cette période est celle de l’immigration de masse, notamment en provenance d’Italie : près de 3 millions d’étrangers viendront s’installer en Argentine jusqu’à la Première Guerre mondiale (soit plus d’un tiers de la population argentine en 1914). La Pampa et de la Patagonie sont de vastes territoires à exploiter, mais la valorisation de ces terres se fait surtout au profit de la propriété.
L’exclusion d’une grande partie de la population du pouvoir politique effectif conduit à la politisation des masses populaires. En 1891, Leandro Alem fonde ainsi l’Union civique radicale (UCR) autour d’un programme démocratique qui conteste l’establishment au pouvoir.
En 1912, la loi Saenz Pena instaure le suffrage universel et obligatoire, ce qui est une avancée vers une plus grande démocratisation (seuls femmes et étrangers restent exclus). Cette réforme électorale bouleverse néanmoins le paysage politique, puisqu’en 1916, c’est un radical qui accède au pouvoir, Hipolito Yrigoyen, mettant ainsi un terme au règne de l’oligarchie. Le nouveau détenteur du pouvoir se lance dans une politique de démocratisation, en faisant notamment adopter une législation sociale et proclamer le droit à l’instruction, sans néanmoins toucher aux structures agraires. Plus tard, les militaires, cherchant à restaurer l’ordre traditionnel, renverse le pouvoir en 1930, propulsant le pays dans ce qui est connu comme la décennie infâme.
Afin de faire face à la crise économique par l’élevage extensif et par la création de postes chargés de limiter la production, l’exode rural entraîne l’accroissement de la population des villes (un million). Cela a pour conséquence la naissance de la classe ouvrière.
Le régime péroniste
Alors secrétaire d’Etat au travail, le colonel Juan Domingo Perón prend le pouvoir en 1945 et devient Président en 1946 au côté de son épouse Eva Perón. Perón instaure un régime populiste s’appuyant sur les classes moyennes, les ouvriers, les syndicats et les mouvements de jeunesse. Eva Duarte (Perón), sensible à l’avenir des Argentins, s’engage très vite dans la vie politique de son mari. Ensemble, ils entreprendront un certains nombres de réformes sociales révolutionnaires pour l’époque : création d’écoles, d’hôpitaux, instauration d’un salaire minimum, réduction du temps de travail. Eva Perón parvient même à accorder le droit de vote aux femmes. Son décès en 1952, l’opposition croissante de l’Eglise (en raison, entre autre, de la suppression de l’éducation religieuse obligatoire et de la légalisation du divorce civil), la désaffection de l’armée fragilise le régime alors que la situation économique est critique. En 1955, Perón est renversé, par un coup d’Etat militaire orchestré par le général Eugenio Pédro Aramburu. En 1973, il est de retour et réélu Président de la République et sa troisième épouse Isabel Perón est élue vice-présidente. Cependant, le climat politique est très perturbé en raison des tensions à l’intérieur même du mouvement péroniste. Perón meurt peu de temps après et son épouse lui succède mais ne parvient pas à relever le pays de la crise économique, la guérilla et la corruption dont il était victime. Elle est renversée par l’armée en 1976.
La dictature militaire à la guerre des Malouines
Une junte militaire présidée par le général Jorge Videla a pour projet la « réorganisation nationale » en supprimant tout élément subversif. Cette période se caractérise par la répression, la torture, des exécutions et disparitions de personnes. Videla tente également de développer une politique économique libérale mais c’est un échec. La valeur de la monnaie nationale ayant considérablement chuté ainsi que l’inflation des prix et l’impossibilité d’augmenter les salaires entraînent une grande partie de la population dans la pauvreté.
Le général Leopoldo Galtieri succède au général Videla, alors commandant en chef de l’armée de terre. Celui-ci décide d’effectuer une expédition aux îles Malouines, occupées par les Britanniques depuis 1830, afin d’en prendre possession. Cette tentative se solde par une défaite des argentins. L’opinion publique est excédée par les échecs du régime militaire alors discrédité. Impuissant, le régime approuve le retour du régime démocratique permettant un gouvernement constitutionnel.
Retour de la démocratie dans une économie en crise
En 1983, Raúl Ricardo Alfonsín candidat de l’union civique radicale (UCR) est élu devant les justicialistes. Il œuvre pour le rétablissement des institutions publiques et institue la CONADEP, la commission nationale sur la disparition des personnes renvoyant à la période de répression sous la dictature de Videla. Un certain nombre de responsables notamment militaires furent condamnés. Cependant, Alfonsín clôture ce chapitre sombre de l’histoire en empêchant les jugements de nombreux responsables militaires (loi du Point final) en 1986. Face à la poursuite de l’inflation et une dette extérieure s’élevant à 60 milliards de dollars, un plan de stabilisation monétaire est lancé. L’Argentine s’aide du Fond monétaire international (FMI) mais l’hyperinflation étant trop importante, elle ne parvient pas à empêcher la récession.
En 1989, en réponse à cette crise politique, économique et sociale les électeurs élisent Carlos Saúl Menem. Domingo Cavallo, nommé au ministère de l’économie, lutte efficacement contre l’inflation notamment par l’application du plan de convertibilité ce qui fait sortir le pays de la crise économique qui l’étouffait depuis des décennies.
Menem continue à assurer le maintien de la zone de libre-échange en Amérique du Sud, instauré quelques années plutôt, notamment grâce à la signature du traité d’Asunción le 26 mars 1991 avec le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay, traité qui donne officiellement naissance au Mercosur. En 1994, Menem modifie la Constitution de 1853 autorisant ainsi la reconduction d’un mandat présidentiel. Il est alors réélu pour un second mandat durant lequel il consolide les fondements de la démocratie, augmente le PIB, maîtrise l’inflation, repositionne le pays au niveau international. Cependant, il ne parvient pas à baisser le chômage ce qui touche profondément une part importante de la population. Son mandat prend fin en 1999 et son successeur est Fernando de la Rúa.
Fernando de la Rúa conduit l’Argentine à la ruine
Son gouvernement (1999-2001) marquera à jamais l’histoire de l’Argentine. En 2001, De la Rúa, impuissant face à la crise économique, fait appel à Domingo Cavallo afin de redresser une nouvelle fois le pays mais celui-ci n’y parvient pas. Les argentins en colère, manifestent en masse dans la rue et organisent des « cacerolazos », protestations pacifiques et bruyantes. Sous la pression Cavallo et les membres du cabinet démissionnent tandis que le président de la Rúa prend la fuite. Le pays est en état de choc et troublé par la succession de trois présidents péronistes dont le dernier est Eduardo Duhalde. Celui-ci met fin à la loi de convertibilité qui assurait la parité entre le peso et le dollar puis il obtient un accord avec le FMI sur le rééchelonnement d’une partie de la dette. Á l’issue de son mandat, il remet sa démission.
Le retour au pouvoir des péronistes : les mandats des Kirchner
Les nouvelles élections de 2003 mènent Nestor Kirchner à la tête de la nation. Sa politique est marquée par des actions menées pour les droits de l’homme et la lutte contre l’impunité (référence aux crimes commis pendant la dictature) ainsi que le redressement économique du pays. Il obtient également la diminution de la dette de l’Argentine auprès de ses créanciers.
Candidate aux élections présidentielles de 2007, Cristina Fernández de Kirchner, épouse et principale conseillère du président de la République est élue dès le premier tour. Une de ses premières actions fut de tenter d’augmenter les taxes à l’exportation de céréales et de soja ce qui l’entraîne dans un conflit intense avec le Campo, le secteur agricole. Sur le plan de la politique extérieure en février 2010, L’Argentine rentre une nouvelle fois en confrontation avec le Royaume-Uni sur la question de l’exploitation d’hydrocarbures sur l’archipel des Malouines soutenant qu’il relève de sa souveraineté. Elle demande aux Nations Unies d’intervenir afin de faire respecter les résolutions de l’ONU visant à ne pas prendre d’initiative concernant l’archipel. En octobre 2011, Cristina Fernández de Kirchner est de nouveau élue pour un second mandat. Le « Kirchnérisme » a permit une conjoncture économique encore très favorable, une forte croissance chaque année, le désendettement permettant une réduction du chômage et le maintien de la politique de redistribution sociale. Aujourd’hui, le bilan de Cristina Fernández de Kirchner est mitigé, il y a des avancées sociales cependant l’inflation augmente et le pays est divisé. En 2015, elle arrivera au terme de ses deux mandats de quatre ans.